ARIANEGROUP : LES ENJEUX INDUSTRIELS POUR CONSERVER LA MAITRISE ET LA LIBERTÉ DE L’ACCÈS À L’ESPACE

La filière des lanceurs a la particularité de devoir envisager simultanément la logique de souveraineté et la logique économique. La création d’ArianeGroup est l’exemple d’une démarche pragmatique où l’État et l’industrie ont mis en commun leurs forces pour répondre aux objectifs de la souveraineté nationale et d’autonomie de l’Europe en se dotant des moyens nécessaires pour répondre aux enjeux d’une concurrence internationale de plus en plus féroce.
Le contexte géostratégique est marqué par un fort investissement des grandes puissances visant à augmenter leurs capacités d’actions dans le domaine spatial et par une récente libéralisation de l’exploitation de l’espace avec notamment les acteurs du new space. Ainsi le maintien de notre liberté d’accès à l’espace qui reste stratégiquement liée à nos activités des missiles balistiques de notre force de dissuasion, repose sur une filière réactive qui soit capable de disposer d’un lanceur compétitif et en mesure de connaître le trafic orbital pour gérer les risques de collision lors d’un lancement, c’est-à-dire in fine assurer une activité spatiale autonome.
 
ArianeGroup est une entreprise fondamentalement duale, héritière de 50 années de développement continu des programmes du missile balistique de la force de dissuasion française et des programmes européens de lanceurs civils Ariane. Les principes de mise en œuvre, les technologies, les compétences et les outils de conception utilisés sont en très grande partie analogues pour un missile balistique et un lanceur spatial. Cette succession depuis les années 60 en quasi alternance des programmes militaires et civils a assuré le développement et le maintien d’une filière industrielle française de haut niveau technologique et à forte valeur ajoutée.
Autrement dit, la garantie d’un accès à l’espace fiable, indépendant et compétitif pour l’Europe représente donc un enjeu majeur pour l’autonomie stratégique de la France liée à la pérennité de la dissuasion océanique. Pour répondre aux défis immédiats de la contrainte budgétaire et de la concurrence commerciale, il est primordial de tenir les délais et de répondre aux besoins du marché international de mettre sur le marché dès 2020 le nouveau lanceur européen Ariane 6 et de continuer de préparer l’avenir pour garder notre leadership.
Ce modèle industriel dual et cette alternance de cycles de développement permettent précisément de maintenir et de renforcer les compétences technologiques et industrielles qui assurent la crédibilité technique apportée au système d’arme de dissuasion M51. Celle-ci est le fruit de l’investissement de plus de 6 000 ingénieurs, techniciens et compagnons engagés dans ce projet complexe. ArianeGroup est un acteur clé d’une filière complète qui concerne pour les activités de la dissuasion plus de 900 industriels français, dont 140 fournisseurs directs et 40 maîtres d’œuvre de sous-systèmes – plus de 30% sont des PME et environ 15% sont des entreprises de taille intermédiaire.
Avec une durée de vie programmée bien supérieure à 30 ans, le système d’armes M51 répond aux évolutions des besoins opérationnels par une démarche incrémentale qui a vu le jour au début des années 2000 et qui permet d’adapter continuellement le système d’arme M51 au contexte géopolitique du moment. La Force Océanique Stratégique dispose donc aujourd’hui à bord de ses sous-marins des performances de ces deux versions : la version M51.1 avec une charge militaire issue du système d’arme précédent M45 et la version M51.2 avec l’emport de la nouvelle tête TNO (Tête Nucléaire Océanique) d’une plus longue portée.
 
Et nous préparons l’avenir :
Prévue autour de 2025, le M51.3 a pour objectif d’adapter les performances du missile aux évolutions des besoins opérationnels par la refonte du troisième étage du missile qui prend en compte en particulier la capacité d’emport d’une nouvelle charge militaire et le traitement des obsolescences. La dynamique compétitive introduite avec le programme Ariane 6 et une utilisation optimisée des compétences duales, rendent possibles ces objectifs économiques et industriels ambitieux dans un flux budgétaire contraint.
Pour autant, la maîtrise des technologies les plus avancées de l’ensemble de la propulsion aux équipements et aux matériaux doit s’entretenir pour continuer d’anticiper les menaces, de faire arriver à maturité les innovations technologiques – voire d’identifier les ruptures éventuelles – à ces échéances. Cela nécessite un investissement continu dans les « études amonts » pour apporter les éléments de choix et les solutions techniques afin d’être en mesure de lancer à temps le développement d’un programme – l’évolution M51.4 du système d’arme – et ainsi maintenir au-delà de l’horizon 2035 une dissuasion adaptée aux évolutions prévisibles des menaces.
Enfin, l’environnement spatial, dans un contexte géopolitique des plus instables, n’est plus figé et devient un facteur déterminant dans la stratégie des puissances. Les grandes nations spatiales (États-Unis, Russie puis Chine) ont fait le choix résolu de préparer de nouvelles capacités (missiles hypersoniques, lasers de puissances, intercepteurs exo-atmosphériques, etc.) pouvant, un jour, leur donner les moyens d’exercer leur puissance dans l’espace. L’autonomie européenne impose la mise en place d’une doctrine nationale et européenne sur la sécurité dans l’espace qui pourrait se traduire par la conception d’une architecture européenne de surveillance de l’espace. En s’appuyant sur les compétences spatiales de ses équipes et le retour d’expérience des clients de son service Geotracker, ArianeGroup est en capacité d’apporter son expertise et ses solutions technologiques pour accompagner le prochain programme de sécurité spatiale que l’Union européenne propose de financer au travers du futur fonds européen de défense et du programme EU SST.